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Contes d’Actualité

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Contes d’Actualité

Contes

Publication: 2002

Les personnages, les faits, les événements, les lieux et les temps de contes d’actualité, même s’ils relèvent de l’imaginaire de l’auteur, ont une prise directe sur notre vie quotidienne et nous invitent à jeter un large regard sur les réalités d’aujourd’hui. C’est pourquoi ce livre aurait pu s’intituler Histoires vraies ou Histoires vécues.

Outre leur valeur documentaire et littéraire, les Contes d’actualité de Léandre Sahiri ont une haute portée morale, philosophique et surtout politique.

Un livre divertissant, provocant, enrichissant qu’on se fait plaisir à lire.

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Préface

(Extrait du Livre)

Le conte puise sa source dans la tradition orale de chaque pays et demeure, dans toutes les sociétés du monde, l’un des meilleurs moyens d’informer, d’inculquer les valeurs cardinales aux plus jeunes et parfois aux moins jeunes, d’ouvrir leur esprit aux meilleures dispositions possibles, et pour tout dire, d’éduquer.

Le conte intègre le comique, le ridicule, l’humour et l’ironie pour divertir, pour inciter au rire. Or, le rire est sanction. Il s’agit de dénoncer, de railler les travers et les déviances de la société, de les sanctionner.

Le conte fait pleurer et rire. Le conte guérit. Il sensibilise au drame, à la tragédie, à la solidarité, à la transgression… Pour socialiser. Pour responsabiliser. Pour se libérer des tensions psychiques, des complexes, des frustrations, des choix inconscients .

Le conte fait rêver . En tant que récit d’événements extraordinaires, de faits surnaturels, d’aventures imaginaires mettant en scène des personnages symboliques, notamment des animaux plus ou moins humanisés, des génies, Dieu, etc. En tant que récit faisant référence à un monde irréel et généralement non localisé, à une époque dont on ne sait pas tout… Le conte est méditation : il incite à l’esprit critique, à la réflexion sur soi et sur l’environnement, sur l’histoire des peuples et des rois. Il reflète une certaine vision du monde. Dans ce sens, il admet une dimension philosophique, comme l’a souligné le professeur Bernard Zadi zaourou.

De plus, le conte transmet à l’interlocuteur la qualité la plus recherchée par l’homme moderne, et qui se place au-dessus de toutes, celle de l’écoute. Il n’y a, en effet, pas d’échanges enrichissants, ni de progrès possible, tant qu’il n’y a pas à la base, la disposition à l’écoute.

Enfin, le conte parle à la tête, sans agresser, sans contrarier, sans provoquer. La pratique du conte est interactive. Elle prépare à l’échange.

Un conte est dit. Et parce qu’il est dit, il sollicite et met en branle tout le système émotionnel de l’auditoire. Par ce biais, le conte délivre son message au plus profond de l’être, dès lors que l’émotion communicative du conteur parvient à capter l’attention de l’interlocuteur. De ce point de vue-là, le conte et le talent du conteur mis à contribution, peuvent être des facteurs éminents de changement intérieur, donc de développement, à terme. A ce titre, le conte est une arme formidable qui, utilisée à bon escient, peut rendre de bien grands services à la société.

Somme toute, le conte requiert tant de dimensions et de fonctions qu’il s’avère exceptionnel et indispensable.

Voilà tout l’intérêt de ce genre, à la fois littéraire et oral, à la fois moderne et traditionnel, qu’a compris l’auteur qui, est, entre autres, un pédagogue et un citoyen déterminé à militer pour une cause noble : éveiller les consciences, par le biais des contes, dans notre société où la communication est devenue un phénomène vital, comme l’est l’oxygène dans un organisme vivant.

Certes, Léandre Sahiri a choisi le conte pour nous aider à cultiver les valeurs suivantes : le sens de l’honneur, de la dignité, du partage, de la solidarité, ainsi que l’esprit d’observation, d’ouverture et d’à-propos, et enfin la disposition à l’écoute. De plus, il préconise le recours aux méthodes modernes et scientifiques, notamment la psychologie et la psychanalyse.

Léandre Sahiri invite à un large regard sur les réalités d’aujourd’hui en puisant aux sources d’hier, aux sources de chez nous et d’ailleurs.

Léandre Sahiri est un homme, bien de chez lui, bien d’aujourd’hui, en osmose avec l’universel.

Les dispositions morales auxquelles il nous invite, instamment à travers ses “contes d’actualité”, sont les facteurs propices au développement intellectuel, préalable incontournable au développement tout court. Par exemple, à travers “Zoukouhi le sage”, est mis à l’index, entre autres absurdités que seul sait en inventer l’orgueil des hommes, l’égocentrisme d’un «sage» qui n’est sage que pour les affaires d’autrui et qui n’a aucune solution pour ce qui le concerne directement. On pourrait établir ici un parallèle avec un certain «sage d’Afrique » qui, parce que soucieux de préparer son entrée dans la postérité, faisait, on le sait, édifier des hôpitaux à l’étranger, finançait des fondations et des institutions internationales, exhibait ses fortunes fabuleuses aux origines pourtant controversées…, pendant que, chez lui, ses compatriotes mouraient de paludisme sous des hangars désaffectés qui tenaient lieu d’hôpitaux, pour ne pas dire de mouroirs.

Dans “Zoukouhi le sage” et “La grenouille vaniteuse”, Léandre Sahiri semble vraisemblablement pointer le doigt en direction de la réplique de la basilique édifiée dans un certain pays du tiers-monde où des milliers de personnes meurent de malnutrition et où l’Etat justement est porté à bout de bras par des puissances étrangères.

Cette sagesse-là, en tant qu’attitude irresponsable est condamnable et condamnée. Elle n’est pas de nature à favoriser la nécessaire réflexion, l’esprit critique, et l’ouverture d’esprit qu’encouragent les “contes d’actualité”. Autant “Zoukouhi le sage” vilipende l’égocentrisme narcissique et la mégalomanie , autant “Le singe et la couronne” et “La plantation de Papa Eléphant” mettent en exergue les qualités qui doivent habiter tout chef ou tout meneur d’hommes, à savoir : la maîtrise de soi, l’équité et le sens de la responsabilité…

Dans la même veine, se place “La grenouille vaniteuse” où l’auteur cloue au pilori l’imitation servile et les comportements simiesques : deux travers malheureux qui peuvent prendre des proportions parfois dramatiques, surtout lorsqu’on les rencontre au sommet de l’Etat, là où, justement, l’on s’attend à un peu plus d’imagination et d’originalité que d’ordinaire.

“Le fétiche du pouvoir” dénonce l’attitude des représentants de premier ordre qui se rendent coupables de parjure, de forfaiture ou de félonie, ceux-là mêmes qui se montrent souvent incapables de tenir la moindre promesse, et qui sont plutôt prompts à manipuler les textes fondamentaux, à l’image du père de “Ibozéa (La Panthère)” pour que ce dernier lui succède absolument, au mépris de l’intérêt supérieur de la communauté. La conséquence de tels actes, c’est tout simplement l’anéantissement de la crédibilité. C’est à se demander si nos dirigeants en ont conscience ?

A ces grands thèmes liés à la conduite des affaires d’Etat, sont associées, dans les “contes d’actualité”, d’autres interrogations sur la vie et la mort, comme pour nous dire combien ces seigneurs qu’on idolâtre et qu’on croit puissants, sont ce que nous sommes, et parfois aussi, sinon plus stupides que nous-mêmes ; ce sont parfois de petites gens ordinaires préoccupés, avant tout et comme nous, par les problèmes de la vie de tous les jours : les chamailleries d’un couple en conflit dans “Zoukouhi le sage” ou bien les détails des coupes vestimentaires d’un seigneur habitué aux honneurs d’ici-bas dans “Le couturier de Koumassi”, en sont, entre autres, l’illustration.

Tout cela, l’auteur l’exprime dans une prose à la limite du badinage, pour souligner l’insignifiance de certains individus qui, laissant de côté les voies qui mènent à l’essentiel, s’accrochent au superficiel et au clinquant. Quelques-uns de ces textes ont été tirés des contes et récits populaires que Léandre Sahiri a entendus dans son enfance. D’autres contes proviennent des sources littéraires, politiques et psychosociologiques. Enfin, d’autres sont purement et simplement inventés.

Léandre Sahiri écrit simplement et comme ses maîtres en la matière, La Fontaine, Esope, Amon d’Aby, Bernard Dadié, Birago Diop et autres. Il s’inspire des faits et des expériences de tous les jours, avec ceux qui les vivent ou qui les racontent. Mais, cela ne l’empêche pas de s’élever parfois jusqu’au sublime, ainsi qu’on peut le constater dans la poétique de “Krasso ou l’exil à contrecœur”.

Dans les histoires qui nous sont proposées, entrent en scène, la plupart du temps, des animaux de la forêt et de la savane, ainsi que les animaux domestiques, comme dans les contes de chez nous racontés jadis au clair de lune, au cours des veillées villageoises, comme dans les Fables de La Fontaine et comme dans les récits de toutes les communautés qui connaissent la pratique du conte.

Ces animaux qui incarnent, sous des formes symboliques, les divers aspects de la condition humaine, il y en a de très gros et de très puissants, tels l’éléphant et le lion ; il y en a de moins gros et de moins puissants, tels le cynocéphale et le chien. Il y en a de tout petits, telles la souris et la fourmi, etc. Certes, cette variété dans le choix de ces personnages traduit la variété et la diversité des aspects de l’humanité. Et, en ces choix, se manifeste la volonté de l’auteur de toucher à l’universel.

Voici, tel qu’il nous a paru, le recueil de “contes d’actualité” que, après “La victoire par la voie des urnes”, nous propose à lire Léandre Sahiri.

Un livre divertissant, passionnant, intéressant qu’on se plaît à lire.

Raymond Okoubo

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